Fortin, Pierrette
Title
Fortin, Pierrette
Subject
Matimekush; Pierrette de la rue; femme autochtone; simplicité; aide communautaire
Description
histoire innue; récit de vie
Creator
Fortin, Pierrette (interviewé)
St-Onge, Evelyne (intervieweur)
Malenfant, Eddy (cinéaste)
Source
Production Manitu inc.
Publisher
Production Manitu inc.
Date
2000
Rights
Production Manitu inc.
Relation
Language
Innu
Coverage
Entretien à Matimekush
Type
récit de vie | oral history
Format
MP4, 16:35 minutes
Original Format
vidéo | video
Transcription
0:05 Evelyne : Kuei Pierrette, je suis contente que tu aies accepté de nous parler… J’aimerais que tu me racontes un peu ton histoire…Comme… Est-ce que tu as grandi ici ? as-tu fréquenté l’école ici ? Présentement tu travailles, en quoi consiste ton travail ? C’est ce que j’aimerais que tu me raconte.
0:25 Pierrette : Oui c’est ça. Mon nom est Pierrette Fortin, je suis originaire de Schefferville. Il y a longtemps, c’est ici que j’ai fait mes études. J’ai fréquenté l’École Notre-Dame. Je suis partie pendant onze ans de Schefferville. J’étais aux études à Québec. J’ai fait mes études en secrétariat et en technique en enfance. Je suis venue chercher un poste qui était affiché ici pour une travailleuse de rue. C’est l’emploi que je fais présentement. J’ai appliqué, et on m’a recruté.
Cela fait 3 ans que je suis à ce poste, depuis septembre 97. J’ai débuté mon poste au titre de travailleuse de rue, pour venir en aide aux jeunes âgés d’à partir de 8 ans jusqu’à 25 ans. Disons dans les environs de 10 ans à-peu-près. Mon travail se passe dans la rue. À l’endroit où nous sommes situés présentement, on pourrait appeler ça le centre-ville. À l’occasion, c’est ici que je me promène sur la rue principale ici en ville.
1:37 Je travaille pour les enfants afin de les mobiliser et les sensibiliser, de les responsabiliser un peu. Je fais de mon mieux, vu qu’il n’y a rien comme activité. C’est ici qu’ils se promènent, ils sont partout.
Mon travail ne me permet pas d’aller à l’intérieur des maisons. Mon travail n’a pas pour but d’aller déranger dans les maisons. Mon travail consiste à faire de la prévention, de l’intervention et je ne me sers pas des policiers. Je me servirais de la police seulement lorsque ça serait vraiment très grave. Comme exemple, si un enfant ferait une overdose, mais c’est rare qu’un enfant fasse une overdose ici. S’il est malade…
2:49 Evelyne : Tu dis que le soir, tu les sensibilisent et les mobilisent, et tu ne te sers pas de la police?
2:57 Oui, comme je viens de t’expliquer, je vais demander l’aide des policiers seulement lorsqu’il y a des cas grave. Et lorsque tu vois les jeunes avec des bières à la main, ou qu’ils soient en train de fumer, je ne peux rien faire car je suis là seulement pour les écouter. Pour être à l’écoute de leurs difficultés, soit dans les amours, et leurs vie familiales. De les aider et non pas les sermonner, sinon si je me servais de la police, ils me verraient comme un délateur, tu comprends. Mais ce n’est pas mon travail.
3:43 Evelyne: Ils doivent te connaître déjà ?, tu es surement devenue une grande amie pour eux?
3:45 Oui, en effet. Avant de quitter Schefferville, j’étais la gardienne de ces jeunes et aujourd’hui, je suis leur gardienne de rue. Je les aide et ils me respectent beaucoup. Je n’ai jamais eu de problèmes depuis que je travaille ici.
4:05 Evelyne: Ils ne te prennent pas pour quelqu’un qui va les dénoncer?
Non, je ne suis pas un délateur.
4:21 Evelyne: Comment leurs parlent-tu par moment?
Pierrette : comme j’ai mentionné, par exemple, dans leurs amours. Je les aide, je les force par rapport à l’école, à ne pas faire des bris. Ne pas briser les choses, à ne pas défoncer, et partout dans différents domaines.
4:52 Evelyne: Et peu importe la température, tu dois être présente?
Pierrette: Oui, qu’il pleuve pas, cela dépends. S’il pleut très fort, je ne suis pas présente.
5:05 Evelyne: Et eux non plus ne devaient pas être là?
Pierrette: Non, il peut arriver qu’ils ne soient pas là. Lorsqu’il pleut averse, ils ne sont pas là, mais lorsqu’il mouillasse, ils sont quand même là. L’hiver un soir, à moins de 30 degrés, j’étais à l’entrée l’Hôtel Royal, et ils étaient là. J’aimais ça. J’étais habitué au froid, d’être debout avec eux, j’étais bien habillée et j’aimais bien ça.
5:38 Evelyne: Comment te perçoivent-ils à l’Hôtel ?. Est-ce qu’on te perçoit pour quelqu’un qui dérange les clients qui boivent ? Les propriétaires, les commerçants.
Pierrette: Non, les commerçants connaissent tous la nature de mon travail. Depuis mes 3 ans en emploi, les commerçants trouvent qu’il y a eu moins de délits, moins de bris et moins de grabuges. Les enfants ont besoin d’une présence et ils aiment avoir quelqu’un à qui parler.
6:30 Evelyne: Est-ce qu’il y en a d’entre eux qui ont cesser de boire?
Pierrette: C’est sûr qu’il y en a qui ont modérés.
6:49 Evelyne: C’est peut-être pour être en gang?
Pierrette: Oui, c’est le fait d’être en gang. Parfois je m’assis avec eux là-bas en face, et nous sommes tous réunis, toujours ensemble. Parfois, je vais les rencontrer et lorsque je m’aperçois qu’ils ne veulent pas se faire déranger, je les saluts simplement et je leurs dis de faire attention à eux. Il peut arriver aussi que dans la soirée, ils crient mon nom pour que j’aille les rejoindre. Ils me content leurs histoires et ils aiment ça.
7:19 Evelyne : Je t’ai vue une fois aller à Montréal pour parler aux femmes autochtones. Comment pourrais-je dire ça ?
Est-ce que ça t’arrive souvent de te faire inviter pour aller parler en avant, ou soit pour aller parler de ton travail ?
7:48 Pierrette: Okay, on m’a convoqué à la première, la deuxième année pour aller faire un atelier à Montréal. À mon retour, j’ai eu des appels téléphoniques de ceux qui venaient de participer à l’atelier. Un moment donné, on m’a demandé d’aller donner une formation à la Romaine. J’ai formé 3 participants dans le domaine de travailleuse de rue. Ils étaient intéressés. Ils avaient déjà débuté leur travail. Aujourd’hui je ne suis pas certaine comment ils vont. Je crois que 2 d’entre eux sont encore là. Ils aimaient beaucoup ça.
8:29 Evelyne: Étaient-ce des garçons ou des filles?
Pierrette: Il y avait un garçon et 2 filles. C’était très différent à la Romaine. Eux travaillaient en motoneige. Il y avait plusieurs salles de rencontres. Différentes places, comme la maison des jeunes, 2 salles de billards.
9:04 Evelyne: Je sais que présentement ils sont en construction pour une maison des jeunes. Penses-tu que ça va changer des choses ? Va-t-il y avoir moins de jeunes ?
9:15 Pierrette: Oui, possiblement. Présentement il y a une maison des jeunes dans le sous-sol de l’école. Les jeunes n’aiment pas vraiment l’endroit. Ils appellent ça la prison, (rire) car il n’y a aucune fenêtre et c’est dans un sous-sol. Alors que prochainement, ça sera très amusant à l’intérieur. Il y aura des jeux, et une salle d’ordinateur. J’ai une idée, à peu-près, de ce que ça va être. On m’a montré les plans.
9:46 Je crois vraiment que certains de ces jeunes iront là-bas, au lieu que de venir ici dans la rue, et au moins il y aura des animatrices pour monter des programmes. D’après moi, ils seront très intéressés, surtout l’hiver.
Evelyne: Surtout quand il fait très froid.
Pierrette: Ce n’est vraiment pas évident ici le soir quand il fait très froid. Surtout quand c’est sec. Parfois le froid peut te donner la peau sèche, et les plaques blanches qui apparaissent au visage et même avoir très froid.
10:21 Evelyne: Est-ce qu’il y a beaucoup plus de jeunes, ou sont-ils moins nombreux?
10:32 Pierrette: Il y a toujours des changements. Présentement, il y en a parmi eux qui viennent d’avoir 18 ans et peuvent rentrer dans les bars. À chaque années, d’autres jeunes surgissent. La raison est qu’il n’y a rien à faire ici. Ils ont hâte, il y aura une piscine à Kawawa prochainement. Ils y auront peut-être accès afin qu’ils puissent aller s’y baigner. Nous avons des tournois de hockey, ou des tournois de ballon-balai, mais à long-terme, ils n’ont pas beaucoup d’activités à faire.
11:21 Evelyne: Tu viens de me dire que tu vas quitter, est-ce qu’il y a quelqu’un qui te remplacera? Est-ce que ce travail va rester ?
11:29: Pierrette: Ils vont surement rechercher quelqu’un plus tard. Mais je ne crois pas que c’est bientôt, car la personne devra être formée.
11:41 Evelyne: Tu as eu une formation toi?
11:41 Pierrette: Oui à Québec. J’ai dû voyager 3 fois. Soit en introduction dans la rue, sur la prévention, ainsi que pour apprendre à faire des interventions.
12:04 Pierrette: Pas sûr !, à Uashat ? Il me dit qu’elle travaillait dans ce domaine !
12:12 Evelyne: Est-ce que ce travail existe dans plusieurs communautés?
Pierrette: Je crois que non. Lorsque j’ai débuté mon travail, on m’a été dit que j’étais la première travailleuse de rue au Québec. Ensuite il y a eu la Romaine. Je crois que présentement, il y a quelqu’un à Uashat, et je crois que c’est Louisa St-Onge, mais pas sure comment elle va aujourd’hui.
12:43 Evelyne: Comment devrais-tu être pour travailler dans ce domaine?
Pierrette: Je ne comprends pas ce que tu veux dire.
Evelyne: Des qualités…
Pierrette: Ok, il faut seulement que tu sois simple. Tu n’as pas à toujours être autoritaire. Tu dois surtout avoir le respect envers les jeunes. Le respect est le plus important. De ne pas juger les jeunes, et de faire attention à eux. Je me suis servie de mon gros bon sens. Ils appellent ça le GBS où il existe une association des travailleurs de rues à Montréal. J’y fais maintenant partie.
Evelyne: En jugement et gros bon sens ?
Pierrette: Oui, c’est dont ce que tu dois te servir.
13:47 Evelyne: J’ai oublié ce que je voulais te demander. Oh, travailles-tu conjointement avec la police ou les services sociaux ici ?
Pierrette: Les services sociaux, c’est l’endroit où est situé mon bureau. Ce sont les services sociaux qui m’ont recruté. J’ai passé mon entrevue par appel téléphonique de Québec. Mon travail consistait de 5% de travail bureautique, et 95% dans la rue. Mon horaire changeait souvent, ce n’était jamais pareil. Printemps, été, automne. Parce-que l’hiver, ils n’étaient pas beaucoup. Mon horaire changeait toujours.
14:37 Evelyne: Et puis, si tu avais un message à transmettre aux jeunes, quel serait ton message ? Que voudrais tu leur dire ? Qu’aimerais-tu dire aux jeunes ?
15:05 Pierrette: Je leur dirai que même si nous n’avons rien ici à Schefferville, de ne pas se décourager, de ne pas décrocher de l’école et de continuer à travailler sur eux. Même si je quitte mon emploi, et la raison pourquoi je dois quitter est que je veux travailler à l’interne. J’ai des rhumatismes, mes mains et mes pieds, et je veux faire attention à moi. J’ai vécu une grosse maladie, c’est un cancer que j’ai eu. Je veux travailler à l’interne et je veux faire attention à moi. Mon message est que, même si je quitte mon emploi, je serais toujours présente pour eux, à les supporter. Je les aime quand même, et je les considère comme mes propres enfants. Je suis amis avec eux et c’est mes vrais amis.
16:03 Evelyne: Avais-tu autre chose à rajouter?
16:09 Pierrette: Non, je vous remercie beaucoup de m’avoir demandé, de vous avoir rencontré ici à Schefferville. J’en ai déjà parler sur la SOCAM dans les premières années. Depuis ce temps, c’est seulement aujourd’hui que j’ai l’occasion d’en reparler.
16:30 Evelyne: Je te remercie beaucoup!
0:25 Pierrette : Oui c’est ça. Mon nom est Pierrette Fortin, je suis originaire de Schefferville. Il y a longtemps, c’est ici que j’ai fait mes études. J’ai fréquenté l’École Notre-Dame. Je suis partie pendant onze ans de Schefferville. J’étais aux études à Québec. J’ai fait mes études en secrétariat et en technique en enfance. Je suis venue chercher un poste qui était affiché ici pour une travailleuse de rue. C’est l’emploi que je fais présentement. J’ai appliqué, et on m’a recruté.
Cela fait 3 ans que je suis à ce poste, depuis septembre 97. J’ai débuté mon poste au titre de travailleuse de rue, pour venir en aide aux jeunes âgés d’à partir de 8 ans jusqu’à 25 ans. Disons dans les environs de 10 ans à-peu-près. Mon travail se passe dans la rue. À l’endroit où nous sommes situés présentement, on pourrait appeler ça le centre-ville. À l’occasion, c’est ici que je me promène sur la rue principale ici en ville.
1:37 Je travaille pour les enfants afin de les mobiliser et les sensibiliser, de les responsabiliser un peu. Je fais de mon mieux, vu qu’il n’y a rien comme activité. C’est ici qu’ils se promènent, ils sont partout.
Mon travail ne me permet pas d’aller à l’intérieur des maisons. Mon travail n’a pas pour but d’aller déranger dans les maisons. Mon travail consiste à faire de la prévention, de l’intervention et je ne me sers pas des policiers. Je me servirais de la police seulement lorsque ça serait vraiment très grave. Comme exemple, si un enfant ferait une overdose, mais c’est rare qu’un enfant fasse une overdose ici. S’il est malade…
2:49 Evelyne : Tu dis que le soir, tu les sensibilisent et les mobilisent, et tu ne te sers pas de la police?
2:57 Oui, comme je viens de t’expliquer, je vais demander l’aide des policiers seulement lorsqu’il y a des cas grave. Et lorsque tu vois les jeunes avec des bières à la main, ou qu’ils soient en train de fumer, je ne peux rien faire car je suis là seulement pour les écouter. Pour être à l’écoute de leurs difficultés, soit dans les amours, et leurs vie familiales. De les aider et non pas les sermonner, sinon si je me servais de la police, ils me verraient comme un délateur, tu comprends. Mais ce n’est pas mon travail.
3:43 Evelyne: Ils doivent te connaître déjà ?, tu es surement devenue une grande amie pour eux?
3:45 Oui, en effet. Avant de quitter Schefferville, j’étais la gardienne de ces jeunes et aujourd’hui, je suis leur gardienne de rue. Je les aide et ils me respectent beaucoup. Je n’ai jamais eu de problèmes depuis que je travaille ici.
4:05 Evelyne: Ils ne te prennent pas pour quelqu’un qui va les dénoncer?
Non, je ne suis pas un délateur.
4:21 Evelyne: Comment leurs parlent-tu par moment?
Pierrette : comme j’ai mentionné, par exemple, dans leurs amours. Je les aide, je les force par rapport à l’école, à ne pas faire des bris. Ne pas briser les choses, à ne pas défoncer, et partout dans différents domaines.
4:52 Evelyne: Et peu importe la température, tu dois être présente?
Pierrette: Oui, qu’il pleuve pas, cela dépends. S’il pleut très fort, je ne suis pas présente.
5:05 Evelyne: Et eux non plus ne devaient pas être là?
Pierrette: Non, il peut arriver qu’ils ne soient pas là. Lorsqu’il pleut averse, ils ne sont pas là, mais lorsqu’il mouillasse, ils sont quand même là. L’hiver un soir, à moins de 30 degrés, j’étais à l’entrée l’Hôtel Royal, et ils étaient là. J’aimais ça. J’étais habitué au froid, d’être debout avec eux, j’étais bien habillée et j’aimais bien ça.
5:38 Evelyne: Comment te perçoivent-ils à l’Hôtel ?. Est-ce qu’on te perçoit pour quelqu’un qui dérange les clients qui boivent ? Les propriétaires, les commerçants.
Pierrette: Non, les commerçants connaissent tous la nature de mon travail. Depuis mes 3 ans en emploi, les commerçants trouvent qu’il y a eu moins de délits, moins de bris et moins de grabuges. Les enfants ont besoin d’une présence et ils aiment avoir quelqu’un à qui parler.
6:30 Evelyne: Est-ce qu’il y en a d’entre eux qui ont cesser de boire?
Pierrette: C’est sûr qu’il y en a qui ont modérés.
6:49 Evelyne: C’est peut-être pour être en gang?
Pierrette: Oui, c’est le fait d’être en gang. Parfois je m’assis avec eux là-bas en face, et nous sommes tous réunis, toujours ensemble. Parfois, je vais les rencontrer et lorsque je m’aperçois qu’ils ne veulent pas se faire déranger, je les saluts simplement et je leurs dis de faire attention à eux. Il peut arriver aussi que dans la soirée, ils crient mon nom pour que j’aille les rejoindre. Ils me content leurs histoires et ils aiment ça.
7:19 Evelyne : Je t’ai vue une fois aller à Montréal pour parler aux femmes autochtones. Comment pourrais-je dire ça ?
Est-ce que ça t’arrive souvent de te faire inviter pour aller parler en avant, ou soit pour aller parler de ton travail ?
7:48 Pierrette: Okay, on m’a convoqué à la première, la deuxième année pour aller faire un atelier à Montréal. À mon retour, j’ai eu des appels téléphoniques de ceux qui venaient de participer à l’atelier. Un moment donné, on m’a demandé d’aller donner une formation à la Romaine. J’ai formé 3 participants dans le domaine de travailleuse de rue. Ils étaient intéressés. Ils avaient déjà débuté leur travail. Aujourd’hui je ne suis pas certaine comment ils vont. Je crois que 2 d’entre eux sont encore là. Ils aimaient beaucoup ça.
8:29 Evelyne: Étaient-ce des garçons ou des filles?
Pierrette: Il y avait un garçon et 2 filles. C’était très différent à la Romaine. Eux travaillaient en motoneige. Il y avait plusieurs salles de rencontres. Différentes places, comme la maison des jeunes, 2 salles de billards.
9:04 Evelyne: Je sais que présentement ils sont en construction pour une maison des jeunes. Penses-tu que ça va changer des choses ? Va-t-il y avoir moins de jeunes ?
9:15 Pierrette: Oui, possiblement. Présentement il y a une maison des jeunes dans le sous-sol de l’école. Les jeunes n’aiment pas vraiment l’endroit. Ils appellent ça la prison, (rire) car il n’y a aucune fenêtre et c’est dans un sous-sol. Alors que prochainement, ça sera très amusant à l’intérieur. Il y aura des jeux, et une salle d’ordinateur. J’ai une idée, à peu-près, de ce que ça va être. On m’a montré les plans.
9:46 Je crois vraiment que certains de ces jeunes iront là-bas, au lieu que de venir ici dans la rue, et au moins il y aura des animatrices pour monter des programmes. D’après moi, ils seront très intéressés, surtout l’hiver.
Evelyne: Surtout quand il fait très froid.
Pierrette: Ce n’est vraiment pas évident ici le soir quand il fait très froid. Surtout quand c’est sec. Parfois le froid peut te donner la peau sèche, et les plaques blanches qui apparaissent au visage et même avoir très froid.
10:21 Evelyne: Est-ce qu’il y a beaucoup plus de jeunes, ou sont-ils moins nombreux?
10:32 Pierrette: Il y a toujours des changements. Présentement, il y en a parmi eux qui viennent d’avoir 18 ans et peuvent rentrer dans les bars. À chaque années, d’autres jeunes surgissent. La raison est qu’il n’y a rien à faire ici. Ils ont hâte, il y aura une piscine à Kawawa prochainement. Ils y auront peut-être accès afin qu’ils puissent aller s’y baigner. Nous avons des tournois de hockey, ou des tournois de ballon-balai, mais à long-terme, ils n’ont pas beaucoup d’activités à faire.
11:21 Evelyne: Tu viens de me dire que tu vas quitter, est-ce qu’il y a quelqu’un qui te remplacera? Est-ce que ce travail va rester ?
11:29: Pierrette: Ils vont surement rechercher quelqu’un plus tard. Mais je ne crois pas que c’est bientôt, car la personne devra être formée.
11:41 Evelyne: Tu as eu une formation toi?
11:41 Pierrette: Oui à Québec. J’ai dû voyager 3 fois. Soit en introduction dans la rue, sur la prévention, ainsi que pour apprendre à faire des interventions.
12:04 Pierrette: Pas sûr !, à Uashat ? Il me dit qu’elle travaillait dans ce domaine !
12:12 Evelyne: Est-ce que ce travail existe dans plusieurs communautés?
Pierrette: Je crois que non. Lorsque j’ai débuté mon travail, on m’a été dit que j’étais la première travailleuse de rue au Québec. Ensuite il y a eu la Romaine. Je crois que présentement, il y a quelqu’un à Uashat, et je crois que c’est Louisa St-Onge, mais pas sure comment elle va aujourd’hui.
12:43 Evelyne: Comment devrais-tu être pour travailler dans ce domaine?
Pierrette: Je ne comprends pas ce que tu veux dire.
Evelyne: Des qualités…
Pierrette: Ok, il faut seulement que tu sois simple. Tu n’as pas à toujours être autoritaire. Tu dois surtout avoir le respect envers les jeunes. Le respect est le plus important. De ne pas juger les jeunes, et de faire attention à eux. Je me suis servie de mon gros bon sens. Ils appellent ça le GBS où il existe une association des travailleurs de rues à Montréal. J’y fais maintenant partie.
Evelyne: En jugement et gros bon sens ?
Pierrette: Oui, c’est dont ce que tu dois te servir.
13:47 Evelyne: J’ai oublié ce que je voulais te demander. Oh, travailles-tu conjointement avec la police ou les services sociaux ici ?
Pierrette: Les services sociaux, c’est l’endroit où est situé mon bureau. Ce sont les services sociaux qui m’ont recruté. J’ai passé mon entrevue par appel téléphonique de Québec. Mon travail consistait de 5% de travail bureautique, et 95% dans la rue. Mon horaire changeait souvent, ce n’était jamais pareil. Printemps, été, automne. Parce-que l’hiver, ils n’étaient pas beaucoup. Mon horaire changeait toujours.
14:37 Evelyne: Et puis, si tu avais un message à transmettre aux jeunes, quel serait ton message ? Que voudrais tu leur dire ? Qu’aimerais-tu dire aux jeunes ?
15:05 Pierrette: Je leur dirai que même si nous n’avons rien ici à Schefferville, de ne pas se décourager, de ne pas décrocher de l’école et de continuer à travailler sur eux. Même si je quitte mon emploi, et la raison pourquoi je dois quitter est que je veux travailler à l’interne. J’ai des rhumatismes, mes mains et mes pieds, et je veux faire attention à moi. J’ai vécu une grosse maladie, c’est un cancer que j’ai eu. Je veux travailler à l’interne et je veux faire attention à moi. Mon message est que, même si je quitte mon emploi, je serais toujours présente pour eux, à les supporter. Je les aime quand même, et je les considère comme mes propres enfants. Je suis amis avec eux et c’est mes vrais amis.
16:03 Evelyne: Avais-tu autre chose à rajouter?
16:09 Pierrette: Non, je vous remercie beaucoup de m’avoir demandé, de vous avoir rencontré ici à Schefferville. J’en ai déjà parler sur la SOCAM dans les premières années. Depuis ce temps, c’est seulement aujourd’hui que j’ai l’occasion d’en reparler.
16:30 Evelyne: Je te remercie beaucoup!
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Fortin, Pierrette (interviewé), St-Onge, Evelyne (intervieweur), and Malenfant, Eddy (cinéaste), “Fortin, Pierrette,” Confluence Premiers Peuples / First Peoples Confluence, accessed November 13, 2024, http://omeka.uottawa.ca/confluence-premierspeuples-firstpeoples/items/show/340.