Mckenzie, Tapi (2)
Title
Mckenzie, Tapi (2)
Subject
histoire; tente à suer (matutishan); guérison; sun dance; tente tremblante; messages; regroupement
Description
récit de vie
Creator
Mckenzie, Tapi (interviewé)
St-Onge, Evelyne (intervieweur)
Malenfant, Eddy (cinéaste)
Source
Production Manitu inc.
Publisher
Production Manitu inc.
Date
2020
Rights
Production Manitu inc.
Relation
Language
Innu
Coverage
Entretien à Mani utenam (Québec, Canada)
Type
récit de vie | oral history
Format
MP4, 20 min. 20 s.
Transcription
Tapi : [00:00:00] Oui, le caribou...Il y en a beaucoup là-bas. [00:00:05] Samson était là-bas. Il en a tué pas mal là d’où il vient. [00:00:11] Il a dû vouloir aller là. [00:00:13] Ce que mon père nous a dit, l’endroit que l’on appelle Uapishku (montagne blanche)…[00:00:19] Je trouve ça drôle…J’étais tout seul à Sawbill. [00:00:23] Mon père avait amené un enfant dans le territoire...Ça été le dernier enfant qu’il a amené dans le territoire. [00:00:30] Et là, je n’avais pas encore fait mon chauffage au bois. J’ai ouvert la radio pour parler. [00:00:36] Il me dit : « Il doit encore être dans ses couvertures, lui là » [Rire] [00:00:41] Et c’est bien ce que je faisais, j’étais encore dans mes couvertures avec la radio. [00:00:45] (Sous-entendu : Il me dit encore :) « Qu’est-ce qu’il t’arrive? Quel temps qu’il fait là-bas? » Je sais pas quoi lui dire, car je n’étais pas encore sorti. [00:00:51] Je lui ai dit : « On voit Uapishkua (montagnes blanches), il fait beau ». [00:00:54] Ils appellent ça Uapishkua (montagnes blanches) au 300...C’est une famille. C’est leur montagne. [00:01:03] Ce qui arrive, cette montagne ressemble à Uapishkuss (petite montagne blanche). Donc, elles sont pareils ces montagnes, tu vois?
Anne-Marie : [00:01:09] Mmm-hmm.
Tapi : [00:01:10] Tu comprends, elle est pareil à celle qu’on appelle Uapishkuss (petite montagne blanche). [00:01:13] Si tu grimpes cette montagne, en haut tu vois tout de très loin. [00:01:17] Quand on grimpe...même sur l’autre montagne, on voit tout autour. [00:01:27] On nous a tous dit, même à Réal dans la famille et aussi à mes frères et sœurs, de ne jamais monter cette montagne...de ne jamais monter cette montagne si nous ne l’avons pas rêvée. [00:01:40] Moi, ce que je comprends c’est que c’est une montagne « sacrée » en français. [00:01:45] Ça veut dire que c’est un sanctuaire, un endroit vénérable. [00:01:49] Je me demande pourquoi il m’a dit...tu vois, je me le suis demandé…j’ai entendu, je vous ai entendu (sous-entendu: parler d’)...un innu du Labrador qui serait entré dans la montagne. [00:02:08] Et aussi, quelqu’un d’autre dans ma famille me l’a raconté, une histoire pareille comme lui il raconte.
[00:02:14] Du moment qu’ils ont vu le caribou partir de ce côté-là de la montagne...[00:02:19] C’est à se demander où il allait. Je ne sais pas. [00:02:22] Et là, arrivé au bout de l’autre côté, on ne voyait plus sa piste. C’est comme s’il avait pénétré dans la montagne. [00:02:31] Mais je ne te dis pas que c’est bien ça...Mais, on nous a bien dit de ne pas monter cette montagne avant de la rêver. [00:02:42] Probablement qu’il devait y avoir une bonne raison, quand j’y pense, pour dire une telle chose. Eux ils le savaient.
[00:02:50] Nous, on ne nous a pas tout dit lorsque nous étions enfants. Car il (Napesh) n’avait pas le temps. [00:02:58] Et moi aussi, je n’avais pas le temps. Je m’occupais de moi en 1993, tranquillement. [00:03:04] C’est seulement quand je suis revenu qu’il m’a raconté plus de choses anciennes. [00:03:12] Il y avait un vieux, je veux dire, il l’écoutait. Il était là assis pendant une soirée de conte. Les autres vieux l’invitaient à venir écouter les histoires...anciennes. [00:03:29] Je regrette tellement parce que ça été une période où j’avais un meilleur contact avec mon père pour se connaître d’homme à homme. [00:03:38] Nous n’avons pas eu assez de temps...trois ans plus tard il est parti. [00:03:44] Et moi, c’est seulement en1993 que j’ai commencé à prendre soin de moi. Le départ où j’ai commencé à vivre on peut dire. [00:03:50] Je buvais beaucoup dans mon passé. Au fond on peut dire, à 6 ans j’ai perdu mes parents quand j’étais au pensionnat. [00:04:00] Au pensionnat à 16 ans, 17 ans, j’étais toujours dans la boisson. Je n’existais plus dans ma vie. Je buvais tout le temps. [00:04:11] Puis là, j’ai perdu contact avec mes parents. Je n’ai pas assez connu mon père...et ma mère, dont j’ai pris conscience qu’elle était présente dans ma vie. [00:04:21] Ma petite maman, c’est moi qui en prend soin maintenant. [00:04:23] Tu vois, c’est moi qui en prend bien soin. À un moment donné, si elle nous quitte…parce que mon père m’a demandé : « Prends soin de ta mère ».
Anne-Marie : [00:04:34] Comme t’a fait pour arrêter de boire?
Tapi : [00:04:37] La tente à suer…La tente à suer, en toute première chose. Je suis allé à Wemotaci. [00:04:43] J’étais encore sous l’effet de l’alcool parce que j’avais bu pendant quelques jours. [00:04:49] Mani-shan (Marie-Jeanne) et Kaiensh (Réal) étaient là. Il y avait un Pow Wow en 1993. [00:04:57] C’est là que j’ai demandé à mon créateur...On m’a dit de crier vers lui. Et j’ai crié. [00:05:03] C’est comme ça que j’ai commencé à croire à ma requête d’assistance. [00:05:09] Par exemple, ça m’a pris du temps...pour remonter et écarter ma colère. [00:05:16] Maintenant, je connais ma colère. Je sais jusqu’où elle me mène, mais je ne la laisse plus me diriger. [00:05:23] J’utilise ma vie pour mieux comprendre ce que j’ai vécu depuis mon enfance. [00:05:31] C’est comme si je faisais un retour en arrière. [00:05:34] Et j’ai vu, comme je t’ai raconté, dans les histoires de mon grand-père...L’histoire des enfants, combien c’était beau, la vie des innu sur le territoire. [00:05:49] Je suis vraiment très fier de vous comme innu, de ce que vous faites comme travail avec les sites sacrées. [00:06:00] Je ressens qu’il y a une grande force. [00:06:05] Ce n’est pas arriver pour rien. Le créateur passe à travers vous. Je parle du tout-puissant.
Anne-Marie : [00:06:13] Comment vois-tu les choses? Aujourd’hui, comment veux-tu contribuer à la vie? [00:06:17] Car où nous sommes, c’est tellement un bel endroit.
Tapi : [00:06:19] Moi ce que j’appellerais, c’est l’ouverture...l’ouverture du coeur. [00:06:27] On ne nous connaît pas vraiment chez les blancs. [00:06:29] Comme toi par exemple, dans ton travail, tu parles de tout ça. [00:06:33] Et moi, il y a des blancs qui viennent me voir…je veux dire des jeunes blancs viennent me voir. [00:06:40] Et là, le innu ouvre son coeur pour partager ce qui vient du créateur. Je veux montrer aux gens qu’on n’est pas ce qu’on raconte de nous. [00:06:55] Quand les jeunes viennent, ils pleurent. Ils disent : « Personne, ne nous traitent ainsi. Il y a une belle manière de nous accueillir ». [00:07:04] Ils ont beaucoup à raconter. Ils disent : « Allons-nous pouvoir entrer tout le monde (sous-entendu : dans la tente à suer)? ». [00:07:11] Et quelqu’un a dit à un de ces jeunes dont la mère avait le cancer : « Prend cette pierre et demande la guérison de ta mère », qu’il lui a dit. [00:07:20] La personne a dit : « C’est qui la personne dont la mère est malade? » [00:07:23] On ne savait pas c’était qui, mais c’était le jeune qui était assis à côté de moi. C’était bien sa mère. [00:07:30] Et on lui a dit : « Nous allons tous prier pour elle ». Je ne sais plus après. [00:07:34] Ils ont aimé leur expérience. « Tu vois, nous, on ne pensait pas que vous étiez comme ça, comme vous êtes » nous ont-ils dit. [00:07:44] En se donnant la main, en riant avec eux et en étant enjoué, ils nous ont dit : « C’est comme si on se connaissait depuis longtemps par votre façon de nous accueillir ». [00:07:55] Vous savez comment il est le innu. C’est ce que j’aime quand quelqu’un vient. [00:08:01] C’est comme une mission pour nous et pour eux aussi. C’est comme une mission. Ils doivent connaître qui nous sommes afin de pouvoir le raconter.
[00:08:13] C’est pourquoi j’aime rencontrer un étranger qui vient de loin. Tu comprends ces gens que l’on appelle Kanak (note : peuple autochtone de Nouvelle-Calédonie). [00:08:25] « Comment se fait-il que vous ayez gardé votre culture? Nous on nous a empêché de garder la nôtre », qu’ils disent. [00:08:34] Tu vois, nous aussi, nous les aidons de leur côté à se relever. [00:08:44] C’est maintenant comme ça. Toutes les fois où je me suis fâché concernant mon combat en lien avec les pensionnats, c’est moi qui ai souffert. Je gardais tout en moi. [00:08:59] Maintenant, je suis capable d’écarter ma colère. Ma paix intérieure s’exprime. [00:09:06] (sous-entendu : Dans ces moments-là), tous les moments du pensionnats ne sont plus là. [00:09:10] Eux aussi ils sont malades, malgré tout ce qui arrive. [00:09:16] Tout ce que j’ai fait dans ma vie, tout ce que j’ai fait, je l’ai remis entre les mains du créateur. Moi, je n’ai pas cette force, mais je veux vivre. [00:09:26] Ce sera peut-être les enfants maintenant, on ne sait pas, qui auront des visions. [00:09:35] Ils pourront aider à la guérison ou célébrer avec les tambours la danse du soleil (note : cérémonie culturelle célébrée chaque année par les autochtones des plaines en l’honneur du soleil et au cours de laquelle les participants démontrent leur bravoure en surmontant la douleur, Encyclopédie Canadienne). Cette personne pourra diriger la danse du soleil. C’est eux l’avenir. [00:09:47] Chez les innu dans deux générations, c’est pour eux qu’on fait tout ça pour que la paix revienne. C’est ça le chemin. C’est ce que mon père m’a dit, mon père m’a dit : « Vous tracez le chemin ». [00:10:02] Je ne comprenais pas (sous-entendu : quand il a dit ça)...C’est seulement maintenant (sous-entendu : que je comprends)…[00:10:05] Te rappelles-tu quand il est venu nous voir? Nous faisions la tente à suer dans la forêt. [00:10:12] Il a dit : « Vous avez un travail important. Vous allez devoir continuer à faire ce que vous faites. Ce sera difficile parce que vous tracez le chemin des enfants et des petits-enfants. » [00:10:23] Quand les enfants viennent (sous-entendu : en forêt), moi aussi ça me rend fier, tu vois? Moi, c’est ça qui m’a permis de me relever. [00:10:31] Et aussi un innu...tu vois? Un innu et un autre innu (sous-entendu : contribue)...C’est pour ça aussi que moi aussi je contribue ici. [00:10:43] Je n’avais pas d’argent mais il y en a tout le temps tout le temps. [00:10:53] Ceux qui sont venus nous voir de loin pour nous aider, je les remercie. Vous avez été les plus inspirants [00:10:58] Là-bas, les îles...il y a sept îles, il y a sept grand-pères. Ils ont été entrés un à un. Tout a été bien ordonné. [00:11:10] « Il y a encore vos vêtements que les ancêtres ont caché pour votre retour ». [00:11:18] Je crois tout ce qu’ils ont dit.
Anne-Marie : [00:11:21] Est-ce que vous avez fait la tente tremblante? Étaient-ils nombreux?
Tapi : [00:11:23] Oui, ils sont arrivés nombreux. On s’en sert bien. C’est bon pour interroger nos ancêtres pour avoir un bon contact. [00:11:36] C’est plus vous...Je veux dire, ils disent : « C’est tellement magnifique ». [00:11:41] Même les curés qui sont entrés (sous-entendu : dans la tente tremblante) ont dit qu’il y avait près de vous quelqu’un de spirituel qui prend soin de vous. [00:11:49] Comment est-ce possible que dans la forêt nous puissions trouver de la nourriture? [00:11:54] C’est ça que je leur dis que nous avons une pharmacie dans la forêt. [00:11:59] Même les animaux sont une médecine pour aider les Innu qui sont malades. [00:12:08] Autrefois, il n’y avait pas d’hôpital. [00:12:11] Par exemple, si quelqu’un se cassait le bras ou le pied on soufflait pour transmettre de l’énergie. [00:12:17] Il y avait déjà une histoire là-dessus qui venait de mon père. [00:12:23] Il avait un ami qui est maintenant décédé. [00:12:27] Avec son piège, il a glissé. Il est tombé et a reçu des entailles jusqu’à l’os. Et là, le vieux Sylvestre a dit : « Il n’y a plus rien à faire avec lui ». [00:12:40] Ça se passe comme ça avec la tente à suer...je veux dire...[00:12:44] parfois c’est bon, parfois c’est difficile. Ils savaient eux nos aînés. Ils ont tous fait leur possible. [00:12:51] Ils ne se sont jamais découragés pour aider. [00:12:55] Mon père m’a raconté beaucoup de ces choses. Et aussi...
Anne-Marie : [00:12:59] As-tu toujours confiance que les innu seront toujours aussi présents?
Tapi : [00:13:02] Innu?
Anne-Marie : [00:13:03] Mmm.
Tapi : [00:13:04] Pour qu’ils soient là?
Anne-Marie : [00:13:05] Oui, les innu comme nous autres qui parlent innu, la culture…
Tapi : [00:13:09] C’est ce qui est le plus important, oui. Moi, j’ai perdu...moi qui te parle, j’ai presque tout perdu. Ma langue innu est courte comme ça. [00:13:15] As-tu compris ce que je veux te dire?
Anne-Marie : [00:13:17] Mmm-hmm.
Tapi : [00:13:18] Je le vois bien. Des fois, j’aime écouter les innu de Mamit. [00:13:23] Les innu de Mamit ont leur propre façon d’exprimer ce qu’ils veulent dire. Mais, c’est pareil. Mais moi, je ne comprends pas. [00:13:31] Les innu de Pessamit ont aussi leur manière de parler. [00:13:35] Quand ils viennent, je ne comprends pas tout parce qu’ils utilisent un langage innu plus authentique. Mais moi, je ne le possède pas, celui qui vient des aînés. [00:13:45] C’est pourquoi, c’est important ce que vous faites sur les enseignements et sur le fait que nous soyons ici. [00:13:53] Par exemple, mes petit-fils parlent français et moi aussi je m’aperçois que je parle français. [00:13:57] Tu vois? Et moi je veux leur parler innu...Comment pourrais-je dire ça...Mais on le souhaite...Je veux dire, tout va revenir. Tu vois...ça c’est revenu. Tout revient à nouveau.
Anne-Marie : [00:14:12] C’est le retour de la tente tremblante…
Tapi : [00:14:13] Oui. Nous pourrons à nouveau la pratiquer, sûrement. C’est à nous. L’héritage qu’on nous a donné. Moi, c’est ce que je vois. [00:14:30] Nous sommes trop proche des choses nuisibles. [00:14:37] Dans la ville, la drogue...On n’a pas assez de force pour lutter. [00:14:45] Il serait bon de retourner dans le territoire. [00:14:49] Aller récupérer ce qu’on appelle sa sérénité pour la redonner aux enfants, leur montrer tout cet enseignement dans les écoles et transférer tout le savoir de nos grands-pères aux tout-petits. [00:15:04] Quand nous étions petits, nous, nous avions quand même appris des bases avant de… [00:15:07] Avec les tout-petits, il faut être avisé sur l’enseignement de la langue innu. [00:15:12] Nous, on nous a empêché de parler notre langue. Moi, on m’a empêché, tu vois? Mais, elle existe encore [00:15:21] Ça veut dire qu’elle va subsister, qu’elle se maintiendra. [00:15:25] C’est comme ça que je vois les choses pour notre communauté. [00:15:29] Je porte ça dans mon coeur et je vois pourquoi ça nous est arrivé, pourquoi. [00:15:35] Avec toutes les difficultés que j’ai eu, j’utilise ma vie pour comprendre mes peines et mes souffrances. Tout sort de moi.
Anne-Marie : [00:15:46] Qu’est-ce que tu dirais si tu parlais aux enfants? Qu’est-ce que tu leur donnerais comme message? Que voudrais-tu leur laisser?
Tapi : [00:15:58] Ce que tu vois au sol, on donnait ça aux enfants pour s’amuser avec le tambour...le hochet. [00:16:07] On leur expliquait de quelle manière on le fabriquait. [00:16:10] Comment bouger le hochet. C’est ça le savoir de nos aînés. On va toujours le dire que ça vient de nos aînés. [00:16:18] Tout comme les pierres de chant pour qu’ils chantent. [00:16:22] Par exemple, mon petit frère Réal...La chanson Tipenimitish (Pitakai)...met grand-père dans ta vie. Il a chanté ça à la radio. [00:16:33] On l’a fait venir à la radio pour qu’il la chante. [00:16:38] Je veux dire ces enfants...ces enfants pour qui leur reviennent de recevoir le pouvoir d’acquérir l’enseignement de la tente à suer. [00:16:52] Des vieilles légendes...pour que toutes les légendes...les légendes étaient importantes dans la façon de transmettre le savoir et le respect des gens. [00:17:00] Moi je me rappelle très bien quand mon père racontait des légendes avec mes cousins et les Vachon. [00:17:06] Nous avions été rassemblés là. [00:17:10] Et là on nous dit : « Ne dérangez pas grand-père, ne lui demandez rien. Ne dérangez pas votre oncle. » [00:17:18] Tu sais un enfant a beaucoup d’imagination. [00:17:21] Il ne sait pas toujours de quoi on veut parler (sous-entendu : dans la légende)...mais il y a un refus à déranger. Il le saura plus tard. [00:17:27] C’était tellement bien. C’est comme regarder un bon film. [00:17:31] C’est comme ça que moi je me rappelle. Tout était si beau. [00:17:37] Maintenant, c’est comme un nuage qui est parti. [00:17:42] Puis moi, j’en ressors comme un être nouveau.
Anne-Marie : [00:17:46] Oui.
Tapi : [00:17:47] C’est pourquoi j’ai un grand respect pour les aînés qui sont encore là comme Kanikuen (Grégoire). Il est à Schefferville Kanikuen Gabriel. [00:17:55] Je veux dire...je me rappelle bien quand j’étais à Schefferville. il y avait des aînés comme Ikueu (Philomène Mckenzie) et tous les autres. [00:18:04] Shapatesh (Jean-Baptiste), il nous racontait des choses. Shapatesh...
Anne-Marie : [00:18:08] Shaupien (Jean-Pierre)?
Tapi : [00:18:09] Non, Ashini, le vieux. Eux, ils étaient témoins et moi, je sais la façon qu’ils le voyaient. [00:18:20] Tu vois...C’était tellement beau. Mais eux, ils n’en parlaient pas parce que les enfants craignaient le curé. [00:18:31] Maintenant, nous le savons ce qui est bon. Moi, je sais ce qui est bon. [00:18:37] Quand mes petits-enfants viennent me voir, je suis avec eux. Je suis avec eux la plupart du temps. [00:18:45] Ils l’ont déjà vécu, donc c’est bon. Ils savent que ça existe. C’est ça l’enseignement. [00:18:54] On ne fait pas n’importe quoi. [00:18:57] Ils chantent et tous les enfants veulent chanter en ce lieu... parce que même les tout-petits enfants sont immergés. Ils reçoivent, oui... [00:19:10] Tu sais, on était là avec les familles et nos amis. [00:19:16] Je ne dis pas que c’est facile à faire. Mais moi, je vois que c’est ce que j’aime quand je regarde mes enfants. [00:19:25] Les autres...(Sous-entendu : enfants) je veux dire, ceux qui sont dans la drogue, il y a en eux un innu. [00:19:34] Il dort comme moi (sous-entendu : j’ai dormi). [00:19:38] Il existait quelque chose de bien pour ma communauté. [00:19:44] Et aussi pour tous ceux qui viendront.
Anne-Marie : [00:19:46] Mmm-hmm.
Tapi : [00:19:47] Ce n’est pas toujours facile de faire son chemin, mais en se regroupant avec les amis nous pouvons construire notre chemin. Selon notre manière de faire les choses (sous-entendu : avec les enfants), c’est une beauté de les voir, de les éduquer. C’est tellement important l’éducation. [00:20:07] Mais par contre, il serait souhaitable d’amener les tout-petits enfants ici (sous-entendu : dans le territoire).
Anne-Marie : [00:20:16] Mmm-hmm, c’est bien...très bien. Nous avons terminé.
Tapi : [00:19:34] D’accord.
Anne-Marie : [00:01:09] Mmm-hmm.
Tapi : [00:01:10] Tu comprends, elle est pareil à celle qu’on appelle Uapishkuss (petite montagne blanche). [00:01:13] Si tu grimpes cette montagne, en haut tu vois tout de très loin. [00:01:17] Quand on grimpe...même sur l’autre montagne, on voit tout autour. [00:01:27] On nous a tous dit, même à Réal dans la famille et aussi à mes frères et sœurs, de ne jamais monter cette montagne...de ne jamais monter cette montagne si nous ne l’avons pas rêvée. [00:01:40] Moi, ce que je comprends c’est que c’est une montagne « sacrée » en français. [00:01:45] Ça veut dire que c’est un sanctuaire, un endroit vénérable. [00:01:49] Je me demande pourquoi il m’a dit...tu vois, je me le suis demandé…j’ai entendu, je vous ai entendu (sous-entendu: parler d’)...un innu du Labrador qui serait entré dans la montagne. [00:02:08] Et aussi, quelqu’un d’autre dans ma famille me l’a raconté, une histoire pareille comme lui il raconte.
[00:02:14] Du moment qu’ils ont vu le caribou partir de ce côté-là de la montagne...[00:02:19] C’est à se demander où il allait. Je ne sais pas. [00:02:22] Et là, arrivé au bout de l’autre côté, on ne voyait plus sa piste. C’est comme s’il avait pénétré dans la montagne. [00:02:31] Mais je ne te dis pas que c’est bien ça...Mais, on nous a bien dit de ne pas monter cette montagne avant de la rêver. [00:02:42] Probablement qu’il devait y avoir une bonne raison, quand j’y pense, pour dire une telle chose. Eux ils le savaient.
[00:02:50] Nous, on ne nous a pas tout dit lorsque nous étions enfants. Car il (Napesh) n’avait pas le temps. [00:02:58] Et moi aussi, je n’avais pas le temps. Je m’occupais de moi en 1993, tranquillement. [00:03:04] C’est seulement quand je suis revenu qu’il m’a raconté plus de choses anciennes. [00:03:12] Il y avait un vieux, je veux dire, il l’écoutait. Il était là assis pendant une soirée de conte. Les autres vieux l’invitaient à venir écouter les histoires...anciennes. [00:03:29] Je regrette tellement parce que ça été une période où j’avais un meilleur contact avec mon père pour se connaître d’homme à homme. [00:03:38] Nous n’avons pas eu assez de temps...trois ans plus tard il est parti. [00:03:44] Et moi, c’est seulement en1993 que j’ai commencé à prendre soin de moi. Le départ où j’ai commencé à vivre on peut dire. [00:03:50] Je buvais beaucoup dans mon passé. Au fond on peut dire, à 6 ans j’ai perdu mes parents quand j’étais au pensionnat. [00:04:00] Au pensionnat à 16 ans, 17 ans, j’étais toujours dans la boisson. Je n’existais plus dans ma vie. Je buvais tout le temps. [00:04:11] Puis là, j’ai perdu contact avec mes parents. Je n’ai pas assez connu mon père...et ma mère, dont j’ai pris conscience qu’elle était présente dans ma vie. [00:04:21] Ma petite maman, c’est moi qui en prend soin maintenant. [00:04:23] Tu vois, c’est moi qui en prend bien soin. À un moment donné, si elle nous quitte…parce que mon père m’a demandé : « Prends soin de ta mère ».
Anne-Marie : [00:04:34] Comme t’a fait pour arrêter de boire?
Tapi : [00:04:37] La tente à suer…La tente à suer, en toute première chose. Je suis allé à Wemotaci. [00:04:43] J’étais encore sous l’effet de l’alcool parce que j’avais bu pendant quelques jours. [00:04:49] Mani-shan (Marie-Jeanne) et Kaiensh (Réal) étaient là. Il y avait un Pow Wow en 1993. [00:04:57] C’est là que j’ai demandé à mon créateur...On m’a dit de crier vers lui. Et j’ai crié. [00:05:03] C’est comme ça que j’ai commencé à croire à ma requête d’assistance. [00:05:09] Par exemple, ça m’a pris du temps...pour remonter et écarter ma colère. [00:05:16] Maintenant, je connais ma colère. Je sais jusqu’où elle me mène, mais je ne la laisse plus me diriger. [00:05:23] J’utilise ma vie pour mieux comprendre ce que j’ai vécu depuis mon enfance. [00:05:31] C’est comme si je faisais un retour en arrière. [00:05:34] Et j’ai vu, comme je t’ai raconté, dans les histoires de mon grand-père...L’histoire des enfants, combien c’était beau, la vie des innu sur le territoire. [00:05:49] Je suis vraiment très fier de vous comme innu, de ce que vous faites comme travail avec les sites sacrées. [00:06:00] Je ressens qu’il y a une grande force. [00:06:05] Ce n’est pas arriver pour rien. Le créateur passe à travers vous. Je parle du tout-puissant.
Anne-Marie : [00:06:13] Comment vois-tu les choses? Aujourd’hui, comment veux-tu contribuer à la vie? [00:06:17] Car où nous sommes, c’est tellement un bel endroit.
Tapi : [00:06:19] Moi ce que j’appellerais, c’est l’ouverture...l’ouverture du coeur. [00:06:27] On ne nous connaît pas vraiment chez les blancs. [00:06:29] Comme toi par exemple, dans ton travail, tu parles de tout ça. [00:06:33] Et moi, il y a des blancs qui viennent me voir…je veux dire des jeunes blancs viennent me voir. [00:06:40] Et là, le innu ouvre son coeur pour partager ce qui vient du créateur. Je veux montrer aux gens qu’on n’est pas ce qu’on raconte de nous. [00:06:55] Quand les jeunes viennent, ils pleurent. Ils disent : « Personne, ne nous traitent ainsi. Il y a une belle manière de nous accueillir ». [00:07:04] Ils ont beaucoup à raconter. Ils disent : « Allons-nous pouvoir entrer tout le monde (sous-entendu : dans la tente à suer)? ». [00:07:11] Et quelqu’un a dit à un de ces jeunes dont la mère avait le cancer : « Prend cette pierre et demande la guérison de ta mère », qu’il lui a dit. [00:07:20] La personne a dit : « C’est qui la personne dont la mère est malade? » [00:07:23] On ne savait pas c’était qui, mais c’était le jeune qui était assis à côté de moi. C’était bien sa mère. [00:07:30] Et on lui a dit : « Nous allons tous prier pour elle ». Je ne sais plus après. [00:07:34] Ils ont aimé leur expérience. « Tu vois, nous, on ne pensait pas que vous étiez comme ça, comme vous êtes » nous ont-ils dit. [00:07:44] En se donnant la main, en riant avec eux et en étant enjoué, ils nous ont dit : « C’est comme si on se connaissait depuis longtemps par votre façon de nous accueillir ». [00:07:55] Vous savez comment il est le innu. C’est ce que j’aime quand quelqu’un vient. [00:08:01] C’est comme une mission pour nous et pour eux aussi. C’est comme une mission. Ils doivent connaître qui nous sommes afin de pouvoir le raconter.
[00:08:13] C’est pourquoi j’aime rencontrer un étranger qui vient de loin. Tu comprends ces gens que l’on appelle Kanak (note : peuple autochtone de Nouvelle-Calédonie). [00:08:25] « Comment se fait-il que vous ayez gardé votre culture? Nous on nous a empêché de garder la nôtre », qu’ils disent. [00:08:34] Tu vois, nous aussi, nous les aidons de leur côté à se relever. [00:08:44] C’est maintenant comme ça. Toutes les fois où je me suis fâché concernant mon combat en lien avec les pensionnats, c’est moi qui ai souffert. Je gardais tout en moi. [00:08:59] Maintenant, je suis capable d’écarter ma colère. Ma paix intérieure s’exprime. [00:09:06] (sous-entendu : Dans ces moments-là), tous les moments du pensionnats ne sont plus là. [00:09:10] Eux aussi ils sont malades, malgré tout ce qui arrive. [00:09:16] Tout ce que j’ai fait dans ma vie, tout ce que j’ai fait, je l’ai remis entre les mains du créateur. Moi, je n’ai pas cette force, mais je veux vivre. [00:09:26] Ce sera peut-être les enfants maintenant, on ne sait pas, qui auront des visions. [00:09:35] Ils pourront aider à la guérison ou célébrer avec les tambours la danse du soleil (note : cérémonie culturelle célébrée chaque année par les autochtones des plaines en l’honneur du soleil et au cours de laquelle les participants démontrent leur bravoure en surmontant la douleur, Encyclopédie Canadienne). Cette personne pourra diriger la danse du soleil. C’est eux l’avenir. [00:09:47] Chez les innu dans deux générations, c’est pour eux qu’on fait tout ça pour que la paix revienne. C’est ça le chemin. C’est ce que mon père m’a dit, mon père m’a dit : « Vous tracez le chemin ». [00:10:02] Je ne comprenais pas (sous-entendu : quand il a dit ça)...C’est seulement maintenant (sous-entendu : que je comprends)…[00:10:05] Te rappelles-tu quand il est venu nous voir? Nous faisions la tente à suer dans la forêt. [00:10:12] Il a dit : « Vous avez un travail important. Vous allez devoir continuer à faire ce que vous faites. Ce sera difficile parce que vous tracez le chemin des enfants et des petits-enfants. » [00:10:23] Quand les enfants viennent (sous-entendu : en forêt), moi aussi ça me rend fier, tu vois? Moi, c’est ça qui m’a permis de me relever. [00:10:31] Et aussi un innu...tu vois? Un innu et un autre innu (sous-entendu : contribue)...C’est pour ça aussi que moi aussi je contribue ici. [00:10:43] Je n’avais pas d’argent mais il y en a tout le temps tout le temps. [00:10:53] Ceux qui sont venus nous voir de loin pour nous aider, je les remercie. Vous avez été les plus inspirants [00:10:58] Là-bas, les îles...il y a sept îles, il y a sept grand-pères. Ils ont été entrés un à un. Tout a été bien ordonné. [00:11:10] « Il y a encore vos vêtements que les ancêtres ont caché pour votre retour ». [00:11:18] Je crois tout ce qu’ils ont dit.
Anne-Marie : [00:11:21] Est-ce que vous avez fait la tente tremblante? Étaient-ils nombreux?
Tapi : [00:11:23] Oui, ils sont arrivés nombreux. On s’en sert bien. C’est bon pour interroger nos ancêtres pour avoir un bon contact. [00:11:36] C’est plus vous...Je veux dire, ils disent : « C’est tellement magnifique ». [00:11:41] Même les curés qui sont entrés (sous-entendu : dans la tente tremblante) ont dit qu’il y avait près de vous quelqu’un de spirituel qui prend soin de vous. [00:11:49] Comment est-ce possible que dans la forêt nous puissions trouver de la nourriture? [00:11:54] C’est ça que je leur dis que nous avons une pharmacie dans la forêt. [00:11:59] Même les animaux sont une médecine pour aider les Innu qui sont malades. [00:12:08] Autrefois, il n’y avait pas d’hôpital. [00:12:11] Par exemple, si quelqu’un se cassait le bras ou le pied on soufflait pour transmettre de l’énergie. [00:12:17] Il y avait déjà une histoire là-dessus qui venait de mon père. [00:12:23] Il avait un ami qui est maintenant décédé. [00:12:27] Avec son piège, il a glissé. Il est tombé et a reçu des entailles jusqu’à l’os. Et là, le vieux Sylvestre a dit : « Il n’y a plus rien à faire avec lui ». [00:12:40] Ça se passe comme ça avec la tente à suer...je veux dire...[00:12:44] parfois c’est bon, parfois c’est difficile. Ils savaient eux nos aînés. Ils ont tous fait leur possible. [00:12:51] Ils ne se sont jamais découragés pour aider. [00:12:55] Mon père m’a raconté beaucoup de ces choses. Et aussi...
Anne-Marie : [00:12:59] As-tu toujours confiance que les innu seront toujours aussi présents?
Tapi : [00:13:02] Innu?
Anne-Marie : [00:13:03] Mmm.
Tapi : [00:13:04] Pour qu’ils soient là?
Anne-Marie : [00:13:05] Oui, les innu comme nous autres qui parlent innu, la culture…
Tapi : [00:13:09] C’est ce qui est le plus important, oui. Moi, j’ai perdu...moi qui te parle, j’ai presque tout perdu. Ma langue innu est courte comme ça. [00:13:15] As-tu compris ce que je veux te dire?
Anne-Marie : [00:13:17] Mmm-hmm.
Tapi : [00:13:18] Je le vois bien. Des fois, j’aime écouter les innu de Mamit. [00:13:23] Les innu de Mamit ont leur propre façon d’exprimer ce qu’ils veulent dire. Mais, c’est pareil. Mais moi, je ne comprends pas. [00:13:31] Les innu de Pessamit ont aussi leur manière de parler. [00:13:35] Quand ils viennent, je ne comprends pas tout parce qu’ils utilisent un langage innu plus authentique. Mais moi, je ne le possède pas, celui qui vient des aînés. [00:13:45] C’est pourquoi, c’est important ce que vous faites sur les enseignements et sur le fait que nous soyons ici. [00:13:53] Par exemple, mes petit-fils parlent français et moi aussi je m’aperçois que je parle français. [00:13:57] Tu vois? Et moi je veux leur parler innu...Comment pourrais-je dire ça...Mais on le souhaite...Je veux dire, tout va revenir. Tu vois...ça c’est revenu. Tout revient à nouveau.
Anne-Marie : [00:14:12] C’est le retour de la tente tremblante…
Tapi : [00:14:13] Oui. Nous pourrons à nouveau la pratiquer, sûrement. C’est à nous. L’héritage qu’on nous a donné. Moi, c’est ce que je vois. [00:14:30] Nous sommes trop proche des choses nuisibles. [00:14:37] Dans la ville, la drogue...On n’a pas assez de force pour lutter. [00:14:45] Il serait bon de retourner dans le territoire. [00:14:49] Aller récupérer ce qu’on appelle sa sérénité pour la redonner aux enfants, leur montrer tout cet enseignement dans les écoles et transférer tout le savoir de nos grands-pères aux tout-petits. [00:15:04] Quand nous étions petits, nous, nous avions quand même appris des bases avant de… [00:15:07] Avec les tout-petits, il faut être avisé sur l’enseignement de la langue innu. [00:15:12] Nous, on nous a empêché de parler notre langue. Moi, on m’a empêché, tu vois? Mais, elle existe encore [00:15:21] Ça veut dire qu’elle va subsister, qu’elle se maintiendra. [00:15:25] C’est comme ça que je vois les choses pour notre communauté. [00:15:29] Je porte ça dans mon coeur et je vois pourquoi ça nous est arrivé, pourquoi. [00:15:35] Avec toutes les difficultés que j’ai eu, j’utilise ma vie pour comprendre mes peines et mes souffrances. Tout sort de moi.
Anne-Marie : [00:15:46] Qu’est-ce que tu dirais si tu parlais aux enfants? Qu’est-ce que tu leur donnerais comme message? Que voudrais-tu leur laisser?
Tapi : [00:15:58] Ce que tu vois au sol, on donnait ça aux enfants pour s’amuser avec le tambour...le hochet. [00:16:07] On leur expliquait de quelle manière on le fabriquait. [00:16:10] Comment bouger le hochet. C’est ça le savoir de nos aînés. On va toujours le dire que ça vient de nos aînés. [00:16:18] Tout comme les pierres de chant pour qu’ils chantent. [00:16:22] Par exemple, mon petit frère Réal...La chanson Tipenimitish (Pitakai)...met grand-père dans ta vie. Il a chanté ça à la radio. [00:16:33] On l’a fait venir à la radio pour qu’il la chante. [00:16:38] Je veux dire ces enfants...ces enfants pour qui leur reviennent de recevoir le pouvoir d’acquérir l’enseignement de la tente à suer. [00:16:52] Des vieilles légendes...pour que toutes les légendes...les légendes étaient importantes dans la façon de transmettre le savoir et le respect des gens. [00:17:00] Moi je me rappelle très bien quand mon père racontait des légendes avec mes cousins et les Vachon. [00:17:06] Nous avions été rassemblés là. [00:17:10] Et là on nous dit : « Ne dérangez pas grand-père, ne lui demandez rien. Ne dérangez pas votre oncle. » [00:17:18] Tu sais un enfant a beaucoup d’imagination. [00:17:21] Il ne sait pas toujours de quoi on veut parler (sous-entendu : dans la légende)...mais il y a un refus à déranger. Il le saura plus tard. [00:17:27] C’était tellement bien. C’est comme regarder un bon film. [00:17:31] C’est comme ça que moi je me rappelle. Tout était si beau. [00:17:37] Maintenant, c’est comme un nuage qui est parti. [00:17:42] Puis moi, j’en ressors comme un être nouveau.
Anne-Marie : [00:17:46] Oui.
Tapi : [00:17:47] C’est pourquoi j’ai un grand respect pour les aînés qui sont encore là comme Kanikuen (Grégoire). Il est à Schefferville Kanikuen Gabriel. [00:17:55] Je veux dire...je me rappelle bien quand j’étais à Schefferville. il y avait des aînés comme Ikueu (Philomène Mckenzie) et tous les autres. [00:18:04] Shapatesh (Jean-Baptiste), il nous racontait des choses. Shapatesh...
Anne-Marie : [00:18:08] Shaupien (Jean-Pierre)?
Tapi : [00:18:09] Non, Ashini, le vieux. Eux, ils étaient témoins et moi, je sais la façon qu’ils le voyaient. [00:18:20] Tu vois...C’était tellement beau. Mais eux, ils n’en parlaient pas parce que les enfants craignaient le curé. [00:18:31] Maintenant, nous le savons ce qui est bon. Moi, je sais ce qui est bon. [00:18:37] Quand mes petits-enfants viennent me voir, je suis avec eux. Je suis avec eux la plupart du temps. [00:18:45] Ils l’ont déjà vécu, donc c’est bon. Ils savent que ça existe. C’est ça l’enseignement. [00:18:54] On ne fait pas n’importe quoi. [00:18:57] Ils chantent et tous les enfants veulent chanter en ce lieu... parce que même les tout-petits enfants sont immergés. Ils reçoivent, oui... [00:19:10] Tu sais, on était là avec les familles et nos amis. [00:19:16] Je ne dis pas que c’est facile à faire. Mais moi, je vois que c’est ce que j’aime quand je regarde mes enfants. [00:19:25] Les autres...(Sous-entendu : enfants) je veux dire, ceux qui sont dans la drogue, il y a en eux un innu. [00:19:34] Il dort comme moi (sous-entendu : j’ai dormi). [00:19:38] Il existait quelque chose de bien pour ma communauté. [00:19:44] Et aussi pour tous ceux qui viendront.
Anne-Marie : [00:19:46] Mmm-hmm.
Tapi : [00:19:47] Ce n’est pas toujours facile de faire son chemin, mais en se regroupant avec les amis nous pouvons construire notre chemin. Selon notre manière de faire les choses (sous-entendu : avec les enfants), c’est une beauté de les voir, de les éduquer. C’est tellement important l’éducation. [00:20:07] Mais par contre, il serait souhaitable d’amener les tout-petits enfants ici (sous-entendu : dans le territoire).
Anne-Marie : [00:20:16] Mmm-hmm, c’est bien...très bien. Nous avons terminé.
Tapi : [00:19:34] D’accord.
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Citation
Mckenzie, Tapi (interviewé), St-Onge, Evelyne (intervieweur), and Malenfant, Eddy (cinéaste), “Mckenzie, Tapi (2),” Confluence Premiers Peuples / First Peoples Confluence, accessed November 22, 2024, http://omeka.uottawa.ca/confluence-premierspeuples-firstpeoples/items/show/275.
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